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Cinq idées reçues sur le jeûne

Le jeûne volontaire est une pratique ancienne, qui a été tour à tour supportée par des philosophes, des religions (toutes les religions ont recours au jeûne pour des motifs divers), des hygiénistes mais aussi des médecins. Pourtant le jeûne à visée thérapeutique, malgré les études de plus en plus nombreuses, reste méconnu (voire encore décrié) par de nombreux professionnels de santé.

En lien avec la Fédération Francophone de Jeûne et Randonnée, qui œuvre depuis 30 ans à la diffusion des connaissances sur le jeûne comme pratique de bien-être et de préservation de la santé, l'Académie Médicale du Jeûne, créée récemment, s'est donnée pour objectif de faire connaître le jeûne, cette fois comme outil thérapeutique. De nombreux patients actuellement sous traitements pourraient ainsi bénéficier d'un encadrement médical pour jeûner.


C'est un pas décisif vers une plus grande visibilité des pratiques du jeûne en France, alors que d'autres pays ont ouvert des cliniques du jeûne depuis bien longtemps. Parmi les freins au développement des pratiques du jeûne (quelles soient thérapeutiques ou préventives) on trouve de nombreuses idées reçues. Je vous en livre ici cinq, vous pourrez en lire davantage dans le livre du Dr Bourdua-Roy et Sophie Rolland (« Comment jeûner » aux Editions Thierry Souccar).

1) Il est nécessaire de manger pour maintenir la glycémie

Et bien non car notre foie peut fabriquer tout le glucose nécessaire aux cellules glucodépendantes et au bon fonctionnement du corps grâce au processus de néoglucogenèse (synthèse endogène de glucose à partir d'acides aminés glucoformateurs ou de triglycérides). Le foie peut donc fabriquer du glucose autant que nécessaire, mais il va également générer rapidement un nouveau carburant - les corps cétoniques - pour répondre aux besoins énergétiques, même en l'absence d'apport de nourriture. Cette bascule métabolique (entre glucose et corps cétoniques) s'opère en général à partir de 48h de jeûne, et la production de ce nouveau carburant permet chez des sujets qui ont suffisamment de masse grasse de rester actif et le plus souvent en forme même avec une glycémie faible.

2) Il faut manger souvent pour activer le métabolisme

Manger plusieurs petits repas par jour active effectivement le métabolisme, mais c'est surtout celui du stockage des graisses qui est activé, par la fréquence élevée de la sécrétion d'insuline. Quand l'insuline est sécrétée le corps entre en mode stockage des graisses, et la lipolyse (c'est à dire l'utilisation des graisses) est inhibée. Plusieurs études ont par ailleurs montré que manger 5 à 6 repas par jour (comme souvent dans le mode de vie occidental) n'augmentait pas le métabolisme de base et n'améliorait pas la satiété, alors que le jeûne aurait un effet positif sur le métabolisme basal.

3) Jeûner va entraîner des carences en nutriments

Déjà, il faut avoir en tête que l'alimentation moderne couvre rarement 100 % des besoins nutritionnels, surtout si la ration alimentaire comporte beaucoup d'aliments industriels. Donc la prévention des carences est à prendre en considération même en dehors de toute période de jeûne. Ensuite, ne pas oublier que pendant le jeûne, un recyclage se fait (autophagie). Il ne faut pas non plus oublier que tout traitement a des effets secondaires : on accepte souvent ceux des médicaments et de la chirurgie bariatrique sans sourciller, alors qu’ils peuvent parfois être importants, voire sources de carences. Pourquoi s’inquiète-t-on autant de carences temporaires potentiellement induites par le jeûne (et qui peuvent s'anticiper et/ou se réguler par une supplémentation adéquate éventuelle), alors que l’on est en train d’essayer, pendant quelques heures ou quelques jours, de renforcer sa santé, voire d’inverser une ou des maladies qui ont des conséquences bien plus graves que des carences (hypertension, diabète de type 2, obésité, …) ?

4) Je vais perdre du muscle si je jeûne

C'est une crainte souvent rapportée mais qui, dans le cadre d'un jeûne mené correctement (notamment avec le maintien d'une activité physique douce), n'a pas lieu d'être. Le corps va effectivement « consommer » des protéines lors d'un jeûne mais il s'agit d'une phase qui ne concerne que les jeûnes de plus de 48h et qui est transitoire. En effet, l'oxydation des acides gras devient rapidement la source majoritaire de carburant, l'organisme réalisant une « épargne protéique » tant que le ratio masse grasse sur masse maigre est suffisamment important (soit environ 40 jours chez un individu de corpulence moyenne pesant 70kg !).

5) Jeûner n'est pas validé par la science

Inutile ici de préciser qu'il n'y a pas d'études sur le jeûne respectant le « gold standard » des études en double aveugle :-) Pour autant, les bases de données bibliographiques montrent que le jeûne fait l'objet de très nombreuses recherches et les observations cliniques recueillies depuis plusieurs décennies existent. Les mécanismes physiologiques du jeûne sont aujourd'hui très bien décrits, ainsi que les effets sur la santé.


Je ne peux que me réjouir de ce nouvel élan dans la pratique du jeûne en France, qui m'encourage encore davantage à poursuivre mes recherches, et à proposer des séjours de jeûne dans un cadre bienveillant et attentionné.



Crédit photo Rivolsal Pixabay

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